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Open Categories Menu Une semaine, une médaille ! – N° 11.
- 14 novembre, 2016 -
- Classé dans Général
Cette semaine, nous allons revenir sur le blog "Une semaine, une médaille ! – n° 5" du 3 octobre 2016, dans lequel nous nous sommes attardés sur le tremblement de terre de 1356.
Suite à la parution de cet article dans le BN 158, un lecteur nous a donné quelques informations fortes intéressantes sur le ressenti de cet événement jusqu'à Strasbourg et les suites qui y furent données… Vous trouverez ci-dessous l'article de Mr Paul Greissler.
A propos du tremblement de terre de 1356
Dans le dernier BN, une médaille bâloise du XIXe siècle a été présentée par Samuel Gouet. Elle commémore le 500e anniversaire de la destruction de la ville par un séisme très violent. Toutefois, loin de ne toucher que la région de Bâle, le séisme a ébranlé toute la plaine d’Alsace jusqu’à Strasbourg et sans doute au-delà. Il a été suivi, comme il avait été précédé par des secousses de moindre ampleur.
La chronique strasbourgeoise de Jacques Twinger (1346-1420), relate précisément l’événement vu de Strasbourg (1) :
« Le grand tremblement de terre qui frappa la ville de Bâle le jour de la Saint Luc
En l’année 1356, le jour de la Saint Luc, durant la nuit, il y eut un grand tremblement de terre en Allemagne. Avant cela, il y eut quelques petits séismes de moindre importance. A l’heure de la grosse cloche du guet, il y eut un grave tremblement de terre qui jeta à bas des cheminées et des pinacles des maisons, la couverture de l’autel et le faîte de la cathédrale. Dans la même nuit, il y eut le grand tremblement de terre qui détruisit Bâle et cinquante châteaux des alentours. Dans la ville, les églises, les maisons, les remparts et les tours s’écroulèrent et un incendie se déclara et dura plusieurs jours si bien que plus personne ne voulait plus rester dans la grande ville. Les gens durent s’installer dans les champs à la campagne, et souffrirent des affres de la faim ayant perdu leurs revenus et leurs biens. Beaucoup de gens et de bétail périrent dans l’incendie et dans les gravats. Ce séisme eut pour conséquence que durant une année, chacun vécut de façon plus modeste qu’auparavant.
Les habitants de Strasbourg ont fui de la ville.
A mois de mai, le jour de la Sainte Sophie de l’année 1357, il y eut un tremblement de terre à l’heure de complies [vers 21 h]. Ce le plus grand qu’il n’y a jamais eu et il occasionna de nombreux dommages aux clochers et aux cheminées. Les habitants de Strasbourg eurent si peur que bon nombre se réfugièrent dans la campagne et s’installèrent sous des tentes ou dans des cabanes, car ils craignaient des effondrements dans la ville comme à Bâle. Les bourgeois de la ville tinrent conseil dans le jardin de l’évêque car ils craignaient l’effondrement de la chancellerie et ordonnèrent que les femmes enceintes et leurs familles ne devaient pas se trouver dans la ville. Mais pour celui qui voulait jardiner sous les murs, il était toléré que l’on dresse une tente.
On interdit également tous les hautes cheminées décorées et les pinacles qui se trouvaient sur les maisons. On interdît aux hommes et aux femmes de porter de l’or, de l’argent et autres bijoux ; pour les nobles seuls, l’or n’était pas interdit. Cet ordre a été oublié depuis assez longtemps. Une année plus tard, les bourgeois instituèrent une procession le jour de la Saint Luc. Les membres du Magistrats doivent porter le Saint-Sacrement, et tous ceux qui sont dans le Conseil doivent suivre la croix, les pieds nus, revêtus de manteaux de bure et de chapeaux ronds tenant à la main un cierge d’une livre. A la fin de la procession, ils doivent offrir ces cierges à Notre Dame et donner leurs vêtements de bure aux pauvres. On cuit 30 quartauts de farines et l’on donne également le pain aux pauvres. Ceci se répète chaque année, le susdit jour de la Saint Luc. »
Un siècle et demi plus tard, une affiche imprimée, datant de la fin du XVe ou du tout début du XVIe siècle, invite les Strasbourgeois à participer à une procession expiatoire en mémoire du tremblement de terre Les membres du Conseil, et tous les habitants sont invités à participer. La conclusion du texte est édifiante : « Afin de préserver le sérieux d’une procession dont le but est d’adoucir la colère de Dieu, chaque chrétien doit, en signe d’obéissance, la suivre pieusement et ne pas rester dans la rue en spectateur ou regarder de sa fenêtre, évitant ainsi d’irriter Dieu et de perdre son âme. »
On peut voir que cette catastrophe a marqué les esprits au point que son souvenir était encore très vivant à la veille de la Réforme. On peut voir également, dans la suite de la chronique, que d’autres secousses furent encore ressenties en 1363, 1364 et 1372. On trouve mention de tremblements de terre de moindre importance aux siècles suivants, elles sont notées dans les marges des registres paroissiaux (2).
Il apparaît que la plaine d’Alsace est bien une zone instable où une nouvelle catastrophe est toujours à redouter.
Notes :
(1) Elle a été publiée à la fin du XVIIe siècle : Johann SCHILTER (éd.), Die alteste teutsche so wol allgemeine als insonderheit elsassische strassburgische Chronicke von Jacob von Königshoven,… von Anfang der Welt biss ins Jahr… 1386 beschrieben, an jetzo zum ersten Mal heraus und mit historischen Anmerkungen in Truck gegeben, Strasbourg, J. Städel, 1698, P 361-362.
(2) Voir par exemple, le registre de la paroisse protestante de Heiligenstein pour l’année 1601 (ADBR 3_E_188/2) ou celui de la paroisse catholique de Lauterbourg de 1737 (ADBR 3_E_261/3) qui, en des termes comparables, relatent d’autres secousses.
